jeudi 4 janvier 2018

Pascal - 13 desserts

Martin 

26 Mars 2008. Naissance de mon premier petit-fils et première visite.

Bonjour mon petit bonhomme, te voilà donc invité au grand festin de la Vie, te voilà donc une nouvelle étoile brillante dans le ciel préparé juste pour toi, te voilà donc investi de la mission de vivre pour le bonheur de toute ton ascendance qui te contemple.
Ton berceau est bien ton trône. J’ai vu défiler les rois mages et puis tous les autres et j’ai vu aussi leurs larmes de joie, ces perles de cristal, ces rivières de diamants, qu’ils t’offrent humblement pour te parer de tout leur Amour. A tes pieds, ils t’admirent, ils prient le bonheur de ton existence toute neuve. Quand tu bailles ou quand tu penches ta petite tête à la recherche de la chaleur du sein ou pour un simple rictus, une esquisse de sourire, ils voient un Ange. Ils voient leur Ange en vrai. Je crois qu’ils se voient en tout ce qu’ils ont de bon. Tu es le réceptacle du Bonheur qu’ils te gardaient. Tu es le creuset de l’or qu’ils te fondent.

Tu accapares les foules admiratives de ta présence au soleil des premières heures de ta vie. Ton public est conquis et pour une larme fondue au brouillard de tes yeux bleus, c’est ton auditoire qui pleure ton jeune tourment. Tu as mis dans leurs poches leurs plus beaux mouchoirs car ces larmes sont la plus grande fortune de ces gens que tu rends heureux.
On est venu de loin pour te connaître et prendre tes trois petits kilos dans les bras et si tu ne pèses pas bien lourd, tu as mis tout ton poids dans les cervelles alanguies et tu prends toute la place. Tu as deux jours et tu as comblé, déjà, toutes les mémoires.
Tu es tout neuf et tu fabriques nos souvenirs. Tu en réveilles d’autres, bien plus lointains…De ces souvenirs qu’on croyait éteints parce que les années savent bien enrouler les heures du temps. On regrette, l’instant d’un éclair, ceux qui ne te voient pas et ceux qui ne te verront jamais, pour leur faire partager le bonheur de ta venue. On a une pensée pour eux et puis, on s’aperçoit qu’on est à leur place, à la première place. On devient la mémoire du passé, témoin du présent et confiant dans le futur, simplement parce que tu es là. Tu resitues les générations, tu organises leur emploi du temps à venir, tu planifies des fêtes, des rires, des joies, des chansons, tu es la Vie. Tu as ta place décorée dans le calendrier du Bonheur pour tous les trois cent soixante cinq jours à venir.

Tu es capital, tu es le futur qu’il me fallait pour bien vieillir au présent. Tu es l’invité permanent dans mon Pays de j’aime à dire. Tu dors et tu éclaires les visages penchés sur toi. Tu es bien l’attraction et le centre de ton nouveau monde. Tu viens de fabriquer en naissant, des oncles, des tantes, des papys, des mamys, des parrains, des marraines, tu es le plus petit et tu bouscules toute ta famille. Tu distribues sans condition à la hiérarchie piétinante, toutes les priorités. Du haut de tes quarante neuf centimètres, tu mets tout le monde à ta hauteur, tu mets tout le monde en ordre de marche, presque à ton pas.

Tu vas apprendre à tes parents tout ce qu’il n’y a pas dans les livres, tu vas leur donner ce qu’ils espéraient le plus au Monde. Quelle belle aventure, tu vas vivre. Tu fabriques des cannes pour les anciens, celles qui ne dérangent pas pour marcher parce qu’elles ont de la valeur, parce qu’elles portent plus facilement et qu’elles font des compagnes utiles et qu’on n’oublie pas…

Auprès de toi, chacun reconnaît ses gènes. On te trouve des airs d’untel ou les cheveux d’unetelle. Tes longs doigts sont les miens ; ceux d’un pianiste qui n’a jamais trouvé sa partition mais qui sait déjà te bercer avec des refrains devenus, maintenant, anciens.
Ton nez est à la grand-mère, tes fossettes à la tante, tes cheveux bouclés à ton père, mais tes oreilles sont sourdes à toutes ces rumeurs. Tu es unique et tu ressembles à toute ta Famille. Tu es le fruit d’un arbre, aux longues racines, bien planté dans cette terre et c’est l’Amour seul, qui t’a fait pousser.
Tu es l’apothéose de notre patrimoine, le bien le plus précieux, inestimable à tous nos yeux, le fleuron des années à venir, le flambeau repris, la continuité bienheureuse, le chaînon qui manquait, le sourire en coin du Papy… Tout le monde te veille et te surveille. On te couve des yeux et tu remplis l’espace de force vitale. Chacun te dessine un avenir à la hauteur de ses propres ambitions.

Un hoquet ? Tout le monde se tait et retient sa respiration pour le faire passer. Une toux ? Toute l’assistance se racle la gorge. Un éternuement ? Il faut vite fermer cette fenêtre entrouverte et te couvrir avec la belle couverture saumon que Mamy a tricotée ! Tout le monde encore, est suspendu à tes borborygmes comme une assemblée de spécialistes attentifs. Tu têtes ta maman et nous tétons tous, avec une application admirative, l’ambiance feutrée de la chambre. Quand un Ange vient dans le monde et qu’il se pose si près, on a l’impression que le Bonheur est palpable.

Et puis, ta petite main m’a attrapé le doigt et je n’ai plus été capable de penser à l’endroit. J’ai senti la chaleur de ta menotte agrippée et je n’osais plus respirer. Ton premier message générationnel a fait taire mon discours intime. J’ai avalé ma salive, reniflé doucement et j’ai posé un baiser sur ton front, le premier, le plus fort, le plus concentré, celui qui vient du plus loin… celui de la région du cœur…

6 commentaires:

  1. Bientôt dix ans et une belle preuve d'amour à un "grand" !

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  2. On fond de bonheur pour le premier, puis le second...C'est chaque fois le même émerveillement. Tu le dis si bien Pascal !

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  3. joli billet tendre, en reconnaissance à la petite pousse de la nouvelle génération :)
    et combien ils nous attrapent le cœur ces petits là !

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  4. Quel bonheur pour l'enfant qui lira ces mots ! ;-)

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